Centre régional de Crise de Wallonie : Anticiper , Alerter, Accompagner
Moins connu que son « grand frère » œuvrant au niveau national, le Centre régional de Crise de Wallonie (CRC-W) apparait pourtant comme un interlocuteur privilégié des autorités publiques et des services régionaux. Ses objectifs : accompagner la crise mais avant tout, limiter son arrivée par un travail d’anticipation, de préparation, de planification et de coordination.
Étendre la carte
Point de contact régional unique
En 2008, le Gouvernement wallon décide de mettre sur pied un centre de crise régional. Avec la mise en place de cette nouvelle structure, l’idée est de proposer un point de contact régional unique pour l’ensemble des gestionnaires de crise que sont le Centre de crise national, les Gouverneurs (niveau provincial) ou encore les Bourgmestres (niveau communal). Près de 15 ans plus tard, bien ancré dans son rôle d’interlocuteur privilégié, le Centre régional de Crise de Wallonie (CRC-W) interagit avec 3 publics :
Les autorités publiques et les gestionnaires de crise fédéraux, régionaux et locaux.
Soyons précis dès le départ, la gestion de l’urgence et de la crise sont des compétences dont la responsabilité et le pilotage sont clairement attribués. Au niveau fédéral, ils sont du ressort direct du ministre de l’Intérieur, qui s’appuie sur le Centre de crise national (NCCN). Au niveau local, pour ce qui concerne les territoires des provinces et des communes, la compétence est dévolue aux Gouverneurs et aux Bourgmestres. En cas de catastrophe en Wallonie, le CRC-W ne prend donc jamais le leadership. La coordination centrale reste toujours une prérogative de l’autorité concernée. Le CRC-W se positionne davantage comme l’interlocuteur régional privilégié, comme un partenaire qui facilite la prise de décision et sert de relais vers les nombreux acteurs régionaux potentiellement concernés.
Les services régionaux et administrations associées.
Vis-à-vis des acteurs régionaux (composantes du Service public de Wallonie, organismes régionaux… ), le rôle du CRC-W s’est construit au fil du temps et est en constante évolution. Depuis 2014 et son intégration au sein du Service public de Wallonie (SPW), le CRC-W est là en tant que support. Il accompagne les services dans le développement de leurs procédures d’urgence et d’anticipation d’une crise. Il faut veiller à la bonne coordination, à l’implication de tous, au respect des règles …
Toutefois, pour certaines thématiques transversales comme par exemple la gestion des inondations, la prévention de la sécheresse ou encore le plan hivernal… le CRC-W se positionne comme un coordinateur régional et encadre tous les aspects liés au suivi de ces thématiques (anticipation, planification, scénarisation, communication … ). Attention, dans ce cadre, pour le centre, coordonner ne veut pas dire décider. Le centre ne prend pas de décision à la place des acteurs, le dernier mot revient toujours à ces derniers.
Les groupes de travail transfrontaliers (Allemagne, France, Luxembourg).
Moins fréquent au niveau du suivi mais tout aussi important : l’aspect international et transfrontalier. Vu la localisation de la Wallonie, cette dernière est fortement influencée par ses voisins et certaines décisions extérieures. Pour assurer au mieux l’échange d’informations, la mise en place d’une bonne collaboration et la participation à des groupes de travail commun est importante et prend tout son sens.
Le soutien bien utile du CRC-W
Lors de la réalisation de plans ou de scénarios, le CRC-W se tourne invariablement vers les services concernés. Ils ont les connaissances, et l’expertise nécessaires.
De son côté le Centre met à disposition des métiers son expérience et ses connaissances relatives à la gestion de l’exceptionnel et à l’anticipation d’une crise éventuelle
Un apport du CRC-W auprès des métiers qui s’avère bien utile, car il n’est facile pour les métiers de se projeter et de prendre du temps pour réfléchir à des situations exceptionnelles ayant souvent (et tant mieux) une probabilité faible de subvenir
Un champ d’action pluriel
Si les publics du CRC-W sont facilement identifiables, il n’en va pas de même pour son champ d’action. Il évolue constamment et cela, pour diverses raisons.
Un texte fondateur souple.
La création du CRC-W s’est faite par décision du Gouvernement wallon. Le document n’énumère pas de manière précise et rigide tous les domaines d’action possibles du centre. Il en ressort une certaine souplesse. Cependant, certains domaines sont parfois tellement techniques, ou ont une portée nationale haute, qu’ils sont pris en charge par d’autres acteurs et il n’est pas souhaitable ou nécessaire que le CRC-W s’en empare. Par exemple, la distribution publique de l’eau. C’est une compétence régionale mais elle est gérée par des distributeurs et ces derniers ont souvent leur propre plan de gestion en cas de crise. In fine, la limite du centre est aussi étroitement liée aux compétences du Service publique de Wallonie et cela, même si les collaborations sont nombreuses avec d’autres acteurs hors SPW.
Aujourd’hui, avec le recul, la souplesse dans les matières dévolues au centre s’avère très utile. Régulièrement, de nouveaux sujets de préoccupation émergent et amènent de nouveaux risques (la spirale médiatique, la cyber sécurité, …). Tous ces nouveaux sujets montrent que les risques évoluent constamment et qu’il est important de se montrer disponible et de garder un œil sur l’actualité et l’avenir.
Une notion de crise variable
Autre élément à prendre en compte, la difficulté de définir la notion de crise. Pour le CRC-W, une crise est un événement qui va impacter sensiblement l’organisation et la continuité des services dans une ou plusieurs de ces dimensions : poursuite des activités, ressources humaines, infrastructures, ressources matérielles, accès aux données … La crise est donc une situation déstabilisante qui résulte d’un événement, soit soudain, soit prévisible qui fait en sorte que l’activité ne sait plus se poursuivre d’une manière habituelle ou convenue.
La préparation d’une crise commence en réalité par une phase d’analyse qui vise à évaluer et à passer en revue toute une série de choses qui peuvent arriver. La situation est analysée pour estimer les niveaux de risques ainsi que la quantification de ces risques. Dans un second temps, une fois cette analyse terminée, se pose la question d’une éventuelle intervention. Soit, on prend certaines mesures pour minimiser les risques, soit l’impact de la crise ne peut être réduit et on mobilise alors les moyens disponibles pour gérer les conséquences.
Idéalement, la meilleure crise est finalement celle qui ne se produit pas. Pour cela, il faut agir en amont en actionnant un double levier : celui de la prévention et celui de l’anticipation (plans, scénarios, exercices …)
Gérer la crise n’est pas tout.
Cela peut paraître étonnant mais ce qui occupe la majeure partie du temps de l’équipe du CRC-W n’est pas la gestion de crise elle-même, mais la préparation et la veille. Le quotidien c’est notamment :
assurer une permanence 24/24 7/7 ,
- organiser une veille,
- suivre les incidents mineurs,
- accompagner les services dans le travail de prévention et d’anticipation,
- informer les autorités publiques et le citoyen,
- coordonner une série de thématiques transversales,
- ….
La gestion de crise elle-même n’est donc pas la plus grande part du travail même si c’est important.
Mutualisation des ressources
À l’heure actuelle, l’équipe du centre se compose de 10 personnes. Quand on voit les missions et l’importance des missions, cela reste une équipe relativement réduite. Toutefois, l’équipe est dimensionnée en fonction de ce que fait actuellement le centre régional de crise.
Allo ? Vous m’entendez ?
Niveau matériel, le CRC-W est surtout orienté outils de communication (télécommunications radio, radio amateur …) et s’inscrit directement dans la logique des autres disciplines partenaires qui sont amenées à gérer les situations d’urgence. L’idée principale étant, en cas de crise, d’être joignable et de pouvoir échanger. Pour cela, le CRC-W s’aligne sur la technologie et les outils développés et proposés par le fédéral. (Be-ALERT, ICMS, Astrid …)
Pour ce qui du matériel spécifique et conformément à sa philosophie, le CRC-W part du principe qu’il n’est pas un pourvoyeur de ressources matérielles en cas de crise. Pour subvenir aux besoins éventuels, il va s’appuyer et relayer les besoins en matériel spécifique vers les métiers partenaires.
L’exception du drone.
La seule exception à ce principe, c’est sans doute le drone. Le centre en possède deux et est en mesure de les piloter. Dans ce cas, la philosophie est vraiment de venir en appui de l’existant. Le drone est, par exemple, mobilisable en cas d’inondations ou de calamité naturelle. Il peut faire des photos pour évaluer les dégâts à l’issue de la crise . Avec le drone, le CRC-W contribue au développement des compétences en interne pour en disposer rapidement et venir en appui à d’autres services. L’idée est de développer cette compétence de manière transversale pour se mettre au service de l’ensemble du SPW.
L’information géographique pour aider à la décision
Consommateur par producteur.
A l’exception des données produite par le drone, le CRC-W ne se positionne pas comme un producteur de données. Il se veut plutôt un consommateur. Grâce aux outils (API Geoviewer, services …) mis à disposition par l’équipe du Géoportail de la Wallonie, l’équipe dispose d’un outil cartographique adapté lui permettant de visualiser et d’interroger toute une série de données utiles. Par exemple pour une pollution, le Centre peut, grâce à l’outil, facilement et précisément localiser l’endroit. Une fois l’emplacement de l’incident déterminé, le centre peut, sans se déplacer, analyser l’environnement direct, estimer les impacts possible (une zone Natura 2000, un quartier, des zones de protection de captage, … ) et lister les métiers et services à contacter.
Analyse et aide à la décision
La cartographie est donc moins un outil de communication qu’un outil d’analyse et d’aide à la décision. Les données géographiques permettent de répondre à plusieurs questions :
- Quels secteurs sont impactés ?
- Quels métiers et quels partenaires contacter ?
- Quelles actions sont à envisager ?
- Quelle est la superficie de la zone concernée ?
La cartographie est d’une grande aide dans le suivi des événements qui ne sont pas scénarisés ou qui sont très localisés. Les situations planifiées ou scénarisées (sècheresse, inondations, plan hivernal...) sont déjà suffisamment documentées, le recours à l’information géographique est alors rare.
Sources multiples.
Le rôle transversal joué par le CRC-W dans l’anticipation ou le suivi d’une crise l’amène à exploiter de nombreuses données. Toutes ne proviennent pas uniquement du SPW. D’autres données sont fournies par des acteurs extérieurs, essentiellement publics.
Si dans les faits, on doit encore déplorer certains freins quant à la mise à disposition de certaines données, dans la pratique, les bonnes relations établies au fil du temps et la reconnaissance acquise petit à petit par le CRC-W facilite l’échange d’informations et le partage.
La crise après la Crise
Si la crise sanitaire actuelle a surtout mis en lumière le travail du centre de crise national , le CRC-W a été et reste mobilisé. L’impact et la durée de la crise actuelle aura de nombreuses conséquences dont notamment celle de créer une plus grande attente des autorités mais aussi du public.
De manière générale, on constate que le risque encouru, actuellement sanitaire, mais la réflexion est valable pour les autres domaines concernés est de moins en moins « toléré». Face à cela, les demandes sont nombreuses pour anticiper et se préparer au mieux. On évoque la nécessité de mieux se préparer à l’avenir, de disposer d’une vision améliorée du territoire et des ressources disponibles et même de donner naissance à un cadre légal renforcé.
Nul doute, que face à ces futurs défis, l’expérience, les ressources et la richesse des partenariats noués au fil du temps seront bien utiles au CRC-W pour jouer son rôle d’intermédiaire et soutenir les acteurs concernés.