Inspirez ... Inspirez ... Dites 34 !
Centrée avant tout sur l’environnement et comportant pas moins de 34 domaines, la directive européenne intitulée « INSPIRE » est au cœur de la politique commune européenne en vue de faciliter et uniformiser l’échange de données. A l’approche de la conférence qui se tiendra en Belgique du 18 au 21 septembre 2018, tour d’horizon de son contenu et de sa mise en œuvre.
La politique INSPIRE et la directive européenne qui fonde celle-ci sont nées de la volonté du législateur européen de mener une politique environnementale transfrontalière plus efficiente. Cette volonté passe par la mutualisation et la possibilité d’échanger des informations, principalement géographiques, couvrant l’ensemble des régions européennes. Au-delà du problème de récolte et de disponibilité de ces données, un obstacle majeur est rapidement apparu, il y avait autant, si pas plus, de modèles de diffusion que d’États membres de l’Union européenne. Dix ans après sa mise en œuvre, retour sur la directive INSPIRE : ses objectifs et son déploiement en Wallonie.
Imposition et non invitation
La directive vise les autorités publiques et leur impose (il s’agit donc bien d’une obligation et pas d’une invitation) deux choses.
- Mettre en ligne leurs données environnementales géographiques ;
- Partager ces mêmes données avec les autres États membres de l’Union européenne.
En remplissant ces deux objectifs, chaque acteur contribue à la volonté du législateur européen de faire tomber les barrières empêchant la circulation des données géographiques ainsi que celles freinant l’information du citoyen.
Wallonie : Plus qu’une simple transposition
Entrée en vigueur le 15 mai 2007, la directive a d’abord fait l’objet, comme toute norme arrêtée par le Parlement européen, d’une transposition en droit belge. Vu l’organisation institutionnelle spécifique de la Belgique la transposition a été réalisée tant au niveau fédéral qu’au niveau régional. Pour la Wallonie, le principal texte de loi est le décret dit « InfraSIG » du 22 décembre 2010. Concrètement, le texte balise et organise l’infrastructure d’information géographique[i] wallonne (définition, métadonnées, interopérabilité, services en réseau, accès au réseau et aux services, partage de données entre autorités publiques).
A la lecture attentive de ce décret en regard de la directive européenne, il faut souligner l’initiative du législateur wallon qui est allé au-delà de la simple transposition en instaurant notamment un Comité stratégique de la géomatique chargé de soumettre un Plan stratégique trisannuel à l’approbation du Gouvernement wallon.
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Quelles données environnementales ?
La directive s’applique donc à l’environnement. Encore fallait-il s’entendre sur cette notion et en donner une définition permettant de lister les données qui allaient faire l’objet de la mise en ligne et du partage. La définition qui a finalement émergé de la discussion entre États membres s’articule autour de 3 grands principes :
Une vision élargie de l’environnement
La notion d’environnement et les données qui s’y rapportent sont détaillées dans les 3 annexes qui complètent la directive. En passant en revue les textes, on constate que le mot environnement a été interprété au sens large du terme. C’est ainsi qu’on retrouve pas moins de 34 domaines : les parcelles cadastrales, l’hydrographie, les réseaux de transport, les adresses, les sources d’énergie…
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L’existence de 3 annexes s’explique par la volonté du législateur européen de phaser la mise œuvre « INSPIRE ». Les données de l’annexe I étant prioritaires par rapport aux données de l’annexe II, elles-mêmes prioritaires par rapport aux données de l’annexe III.
Partir des données électroniques existantes où à venir.
Vu l’ampleur de la tâche, il ne fallait pas compliquer plus encore le cahier des charges. C’est ainsi que la démarche porte uniquement sur les données existantes ou à venir ET disponibles sous format électronique. Aucune version papier existante n’est à prendre en compte.
Personne n’est parfait, les données non plus.
Dans un premier temps, les données disponibles ne devront pas présenter un caractère parfait, c’est-à-dire répondant exactement aux attentes de la législation. Toute information pourra être mise en ligne et partagée à condition que l’étendue de sa qualité soit clairement et objectivement renseignée.
Les acteurs de la directive
Si la directive est une initiative européenne, elle s’applique aux autorités publiques de chaque État membre. Au niveau national, si c’est la Belgique qui en tant qu’État est l’interlocutrice de l’Europe, ce sont les Entités fédérées (l’État fédéral et les 3 Régions) qui se sont vues confier la mission de la mise en œuvre.
Les acteurs européens : Commission européenne et comité « INSPIRE »
La Commission européenne est responsable de la coordination au niveau européen. Elle est assistée d’organisations comme l’Agence européenne de l’environnement et d’un comité INSPIRE composé de représentants des différents pays. Pour compléter son expertise, la Commission s’est également entourée de communautés d’intérêt de données spatiales (Spatial Data Interest Community ou SDIC), d’organisations légalement mandatées (Legally Mandated Organisations ou LMO) et de groupes de travail thématiques (Thematic Working Group ou TWG).
Les acteurs belges : comité de coordination, cellule et Forum
Une cellule a été constituée et sert d’interlocuteur unique pour la Belgique auprès de la Commission européenne. Le directeur de cette cellule ainsi que le représentant belge au sein du Comité européen siègent dans un comité de coordination (CC) chargé de superviser la situation belge et se complète de représentants des différents niveaux de pouvoir belges.
Dernier acteur belge, le forum se veut une plateforme de discussions pour toutes les personnes intéressées par la directive et ses objectifs de partage et de mise en ligne des données géographiques.
Les acteurs wallons : Comité stratégique géomatique et Département de la Géomatique du Service public de Wallonie
Le Comité stratégique de la géomatique (CSG), instauré par le décret InfraSIG est un organe qui vise à coordonner la production et la diffusion des données géographiques en Wallonie. Il est constitué d’acteurs issus du service public mais aussi d’acteurs du secteur privé.
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Pour appliquer les orientations prises par le Comité stratégique de la géomatique et répondre aux attentes de la directive « INSPIRE », le Gouvernement wallon peut s’appuyer sur le Département de la Géomatique du Service public de Wallonie et plus particulièrement sur la Direction de l’intégration des géodonnées.
Petit à petit, INSPIRE fait son nid
Vu l’ampleur de la tâche, il était impossible et surtout malvenu de demander à chaque État membre de répondre du jour au lendemain aux attentes de la directive. Raison pour laquelle une feuille de route a été mise en place. Cette dernière organise la mise en œuvre de la directive et permet à chaque autorité concernée de planifier le changement en fonction de son organisation et des moyens dont elle dispose.
Si les premières dates de l’échéancier évoquait la transposition de la directive en droit national (fédéral et régional pour ce qui concerne la Wallonie), les échéances majeures restantes ne sont plus qu’au nombre de deux.
Novembre 2017
L’ensemble des données issues de l’annexe I (unités administratives, référentiels de coordonnées, adresses, …) doivent être conformes.
Octobre 2020
La conformité à la directive est demandée pour l’ensemble des données en ce compris celles listées dans les annexes II et III.
Et la Wallonie ? bon ou mauvais élève ?
Il ne faut pas s’en cacher, la Wallonie ne fait pas partie des meilleurs élèves de la classe « INSPIRE » même si elle a été pionnière dans la mise en place d’une infrastructure de données spatiales. L’existence du Géoportail wallon et d’une gestion des données géographiques par l’administration sont antérieures à l’arrivée du texte INSPIRE. La philosophie de la directive visant le partage et la mise en ligne des données était donc déjà présente en Wallonie et s’est vue en quelque sorte confortée par l’arrivée de la directive et du décret InfraSIG. Mais, les efforts se poursuivent : reconnaissance prochaine du Lambert 2008 comme nouvelle référence spatiale, rédaction et mise à disposition de modèles et de procédures pour les services de visualisation à destination des producteurs, campagne de sensibilisation des acteurs régionaux, …. Il s’agit de faire comprendre et de convaincre les gestionnaires de données, tant publics que privés, de l’utilité et du bien fondé de la directive mais aussi de répondre aux attentes et prescriptions techniques très précises de l’Europe.
EN SAVOIR PLUS
Consulter le site de la conférence européenne 2018
[i] On appelle infrastructure d’information géographique un ensemble de services d’information disponibles sur Internet, répartis sur les sites web des différents acteurs concernés, et permettant la diffusion et le partage d’informations géographiques, c’est-à-dire de cartes interactives et des données associées. (La Directive Inspire pour les néophytes – Marc Leobet, Francis Merrien, Février 20011, 2ème édition)